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Le service des achats ne doit pas jouer le rôle de pompier - Drasko Jelavic

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Olivier Audino
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Performance achat

Les Achats ne sont pas les pompiers de service !

« Tout le monde perdrait si le service des Achats jouait le rôle des sapeurs-pompiers tous les jours ». Drasko Jelavic, PDG et fondateur de Cirtuo, donne une version très imagée du département Achats qui passe la majorité de son temps à éteindre des « feux quotidiens ». En effet, les services des achats et supply chain doivent à la fois gérer l’opérationnel ET faire de la stratégie, c’est-à-dire en vrac : traiter des demandes incessantes émanant des différents services de l’entreprise, passer des achats hors-contrats, assurer le lien avec les décideurs… Selon ce chef d’entreprise, le service des achats et approvisionnements doit arrêter de jouer les pompiers. Il mentionne aussi le point crucial des données erronées lors des négociations avec un fournisseur à risque (car unique). Par où commencer au milieu de ce tumulte ? Il tire le signal d’alarme en proposant 7 points de réflexion pour les Acheteurs.

Le contexte actuel du service des achats imagé par Drasko Jelavic

« Imaginez que sur le chemin du travail, en marchant dans la rue, vous voyez quelqu’un qui est en feu. Vous l’aiderez sûrement à éteindre le feu. Que se passerait-il si le lendemain et les jours suivants, vous rencontrez une autre personne en feu qui a besoin de votre aide ? Bien sûr, vous allez l’aider, mais vous vous demanderez aussi : « pourquoi toutes ces personnes sont-elles en feu ? où sont les pompiers ? pourquoi dois-je faire le travail du pompier ? J’ai aussi mon propre travail ».

Aussi absurde soit-elle, cette même situation est vécue par les Directeurs Achats et leurs équipes qui doivent s’occuper à la fois de tâches opérationnelles et stratégiques liées aux achats et approvisionnements. Ils passent leur journée à essayer de gérer d’un côté le chaos généré par les innombrables demandes d'achats, les achats non conformes comme les achats de classe C, le manque de connexion avec les parties prenantes internes, les allers-retours incessants avec les fournisseurs et les erreurs de commande. D’un autre côté, ils sont aussi coincés à cause des données inexactes lors des négociations avec des fournisseurs à risque. Et ils ne peuvent rien dire, car c'est leur seul fournisseur. Sans parler des appels téléphoniques et des courriels criards.

service des achats et approvisionnement.

Chaque jour, c’est la même chose pour le service des achats et approvisionnement. C’est comme ajouter de l’huile sur le feu et cela n'en finit pas. Ils finissent par s’épuiser et ne parviennent plus à réaliser que le strict minimum pour l'entreprise. En effet, ils doivent à chaque fois arrêter de faire des choses plus importantes pour des choses urgentes. Ce sont deux choses différentes.

Par où commencer ?

L'étape zéro pour tenter d’éteindre les incendies du service des Achats est de savoir si on fait partie d'une entreprise qui encourage et récompense éventuellement ce type de comportement. Si c'est le cas, le changement sera le plus grand défi à relever, mais pas impossible. 

Quelle que soit la culture de l’entreprise, aucune ne dira non à de meilleures économies, à plus de valeur ajoutée et, par conséquent, à une augmentation des bénéfices pour les actionnaires. Tout d'abord, il convient de bien cerner la force motrice de la direction. Est-ce qu'elle est plutôt axée sur les économies de coûts à court terme, la croissance durable, la réduction des risques, la mise en œuvre de procédures opérationnelles ou l'application de normes éthiques ?

Ensuite, l'approche consiste à avancer à petits pas, c'est-à-dire à identifier les fruits mûrs que l'entreprise n'a pas encore cueillis, puis à s'appuyer sur ces résultats. En effet, la lutte contre les feux ne fera que maintenir l'entreprise à flot. En revanche, les perspectives stratégiques la feront croître.

C'est l'image que le top management et les parties prenantes internes ont besoin de voir de la part des achats et ils l'accueilleront à bras ouverts si l'image est bien dessinée.

Comment dessiner le reste du tableau ?

Il s’agit là de suivre un certain nombre d’étapes concrètes pour transformer la fonction achats et approvisionnement en une fonction vraiment stratégique :

1- Identifier les décideurs internes

Cette étape n’est pas facile à réaliser surtout quand on évolue dans une structure décentralisée en une multitude de Business Units ou de marques. En effet, les décideurs internes ne sont pas toujours faciles à reconnaître dans ce type d’organisation. 

Le processus d’achats fait intervenir plusieurs parties prenantes en interne ou en externe. Il y a d’abord l’utilisateur qui est celui qui consomme le bien ou le service acheté. Puis, il y a l’acheteur qui est celui qui effectue l’acte d’achat. Il y a également le payeur, celui qui finance l’achat ou qui engage les fonds nécessaires à la transaction. Ensuite, on retrouve le décideur. C’est celui qui décide pour l’achat. Il juge s’il doit y avoir un achat ou un non-achat en tenant compte de plusieurs paramètres, dont la trésorerie de l’entreprise, la stratégie d’achats adoptée, la nature de l’achat (achats indirects, directs…), etc. Il y a également le prescripteur, celui qui initie la décision d’achats

En fonction de la taille de l’entreprise, le nombre de décideurs internes peut varier. Par exemple, dans une PME, le payeur, le décideur et l’acheteur ne font qu’un. Il s’agit souvent du directeur général ou du propriétaire. Dans les sociétés plus importantes, les rôles sont tenus par des personnes différentes, le plus souvent par le chef ou directeur d’un service particulier.

L’identification des parties prenantes internes permet de maîtriser et unifier la chaîne des achats, optimiser les dépenses et réaliser une cartographie des achats qui est essentielle pour mettre en place une bonne stratégie des achats et approvisionnements.

2- Mettre en œuvre une stratégie Achats en phase avec les attentes de l’entreprise et de ces décideurs

On dit toujours qu’une bonne stratégie d’achats doit être au service du business. Pour cela, elle doit s’aligner sur la stratégie globale de l’entreprise, mais aussi sur celle des décideurs. 

Cet alignement des stratégies doit permettre de contribuer aux deux enjeux majeurs de l’entreprise : créer un avantage concurrentiel et gérer les risques fournisseurs. 

Une bonne politique d’achat doit permettre à l’entreprise de développer son business à travers la différenciation. Cela implique pour le service des achats et supply chain de trouver des fournisseurs compétitifs et innovants.

Pour qu’une stratégie d’achats serve les enjeux stratégiques de l’entreprise, il faut également prévoir une bonne gestion des risques fournisseurs, c’est-à-dire mettre en place une bonne évaluation fournisseurs ou audit fournisseurs. 

3- Analyser les écarts entre la performance et les compétences pour mener à bien la nouvelle stratégie

L’analyse des écarts, aussi appelée analyse des besoins, est un outil de gestion permettant à une entreprise d’identifier la meilleure façon d’atteindre ses objectifs. Elle consiste à comparer sa performance réelle aux compétences souhaitées en vue de l’élaboration d’un plan stratégique de croissance. Une analyse des écarts peut être effectuée afin de recueillir les données nécessaires à l’établissement d’une stratégie d’achats, entre autres. 

Cet outil de gestion peut ainsi être utilisé pour résoudre les problèmes de performance de la fonction achats. Il permet d’identifier les points faibles ou les lacunes liées à la politique d’achats et approvisionnement actuelle. Une fois la cause déterminée, il sera plus facile d’améliorer le processus d’achat pour améliorer la situation. Enfin, une analyse des écarts peut aussi être réalisée lorsque les décideurs ont besoin de plus de contexte. Elle permet d’évaluer les ressources disponibles et leur utilisation pendant l’année écoulée. Les résultats de l’analyse permettent alors de définir comment les utiliser de manière plus efficace à l’avenir.

4- Transformer les Achats en pilotes stratégiques de l’activité

A l’heure où les achats représentent 60% du chiffre d’affaires d’une entreprise, voire 80% dans certains secteurs d’activités, la fonction achats ne doit plus être considérée comme une simple fonction « support » rattachée à la production. Elle doit être intégrée au processus et à la planification stratégique de l’entreprise. En effet, on a longtemps pensé que seule l’optimisation de la fonction commerciale permet d’accroître les ventes et les marges. C’est faux ! 

Via l’optimisation des processus d’achats ou encore l’externalisation et la globalisation des achats, la fonction achats et approvisionnements pourrait aussi contribuer à réduire les coûts, et ainsi à la rentabilité de l’entreprise.

La maîtrise des processus d’achats, rendue possible grâce aux nouvelles technologies comme l’e-sourcing et l’e-procurement, permet de transformer les achats en pilotes stratégiques de l’entreprise. L’émergence de solutions de Sourcing-to-Pay ou Procure-to-Pay, comme Sourcing Force, permet aux acheteurs de gagner en efficacité et de jouer un rôle stratégique dans l’atteinte des objectifs de la société. En effet, ces outils leur permettent de faire jouer la concurrence, et par conséquent, de réduire les coûts et les délais.

5- Attirer les bonnes compétences

L’amélioration de la fonction d’achats passe aussi par le recours à des compétences adéquates. Il faut sélectionner les personnes ayant les compétences adéquates et capables de mettre en œuvre la stratégie.

Avec la digitalisation des achats, les acheteurs doivent aussi enrichir et adapter leurs compétences aux besoins de l’entreprise et au marché. En ce sens, cinq compétences leur sont notamment demandées : la capacité à sourcer efficacement l’innovation, à mettre en place une stratégie de responsible purchasing ou achats responsables en anglais, à maîtriser les nouvelles solutions digitales, à piloter la stratégie en période de crise et à analyser la vulnérabilité du réseau fournisseurs.

6- La stratégie doit être structurée par catégories, risques et fournisseurs

Une bonne stratégie d’achats doit aussi être bien structurée. Il faut développer des stratégies par catégories, risques et fournisseurs. Cette structuration permet de mieux appréhender chaque situation ainsi que les différents risques liés au processus d’achats ou supply chain.

La gestion des catégories consiste à segmenter le marché d’approvisionnement de manière à optimiser le processus d’achats et d’approvisionnement pour générer des économies sur les coûts. Elle permet aussi d’appréhender les risques fournisseurs qui peuvent avoir des impacts significatifs sur le bon déroulement des activités de l’entreprise. 

7- Créer des indicateurs de performance clés (KPI) à tous les niveaux pour suivre la mise en œuvre de la stratégie

Les indicateurs de performance clés, ou KPI en anglais (Key performance indicators), sont des données chiffrées qui permettent de suivre ou évaluer l’efficacité d’une action ou plan d’action par rapport aux objectifs définis. Ils permettent aux décideurs de suivre l’évolution de la performance globale de l’entreprise et prendre des décisions plus éclairées sur la stratégie. 

Les KPI n’ajoutent pas de la valeur à l’entreprise. Toutefois, ils sont devenus indispensables pour lui permettre d’atteindre ses objectifs. On distingue deux catégories de KPI : les indicateurs permettant de mesurer les activités de l’entreprise et ceux qui concernent l’impact des actions sur le marché. Il faut aussi faire la différence entre les indicateurs de résultat qui expriment une réussite et les indicateurs de suivi qui servent à piloter l’action. 

Les indicateurs de performance peuvent être mis en place pour toutes les actions mises en œuvre ou stratégies adoptées au sein d’une organisation en vue de suivre l’atteinte d’un objectif global ou spécifique. Un bon KPI doit comprendre une mesure, une cible, une source de données et une fréquence des rapports. Il doit également être aligné avec la stratégie de l’entreprise et ses objectifs et fournir des plans d’actions. Un indicateur inactionnable n’est pas efficace. Par exemple, si les indicateurs que vous avez retenus vous permettent de savoir que vos coûts ont diminué de 20% grâce à vos stratégies achats et approvisionnement. Ils doivent vous permettre de savoir pourquoi. Vous pourriez ainsi connaître les actions à continuer ou à arrêter pour optimiser les résultats. 

Service d'approvisionnement

Selon Drasko Jelavic, les outils digitaux sont les seuls véritables « canons à eau » permettant d’éteindre les incendies ! En tant que soutien au processus d’achats, ils deviennent indispensables à certaines étapes de celui-ci. Ils apportent de la structure, de la discipline et de la crédibilité à la gestion de grandes quantités d’informations sur les achats et approvisionnements.

Drasko Jelavic est convaincu qu'une fois que les directeurs d’achats et leur équipe seront armés de ce type de connaissances, ils ne joueront plus le rôle de pompiers. Leur expérience et leur expertise pourront être utilisées à bon escient pour permettre au service des achats d’atteindre ses objectifs.

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